L'industrialisation de la ville du Pré provoque une véritable explosion démographique au XIXe siècle, rendant obsolète la chapelle. Au début du XXe siècle, un nouvel édifice est construit, l'église de la Sainte-Famille, répondant mieux aux nouveaux besoins religieux.
Le Pré, un écart de Pantin, doit son nom actuel à la fondation d'une chapelle consacrée à saint Gervais.
Bâti dans une prairie, au pied de la colline de Belleville, le hameau du Pré dépend administrativement et spirituellement de Saint-Germain l'Auxerrois à Pantin. Les habitants, souhaitant se défaire de cette tutelle, réussissent à obtenir, en 1588, la construction de leur propre chapelle. Les religieux de Saint-Denis, seigneurs de Pantin, offrent à la nouvelle chapelle une relique de Saint Gervais. La chapelle prend le vocable du saint martyr et de son frère jumeau, saint Protais, lui aussi martyrisé. Malgré cette chapelle, les paroissiens de Saint-Gervais-Saint-Protais demeurent sous la juridiction du curé de Pantin qui conserve ses prérogatives : aucun mariage, aucun enterrement ne peut être célébré dans la chapelle du Pré. Durant plusieurs décennies, les bénéfices vont soit au curé de Pantin, soit à celui du Pré. En 1613, l'évêque de Paris autorise la célébration de messes basses et la création d'une école dans la chapelle. Toutefois, l'exercice du culte continue à se faire sous l'autorité du curé de Pantin, subordination maintenue jusqu'à la Révolution de 1789. Malgré l'inconfort des chemins et l'éloignement, les habitants du Pré continuent à se rendre à l'église Saint-Germain-l'Auxerrois à Pantin pour les grandes fêtes religieuses, telles que Pâques.
Selon l'abbé Lebeuf, le hameau du Pré compte, en 1754, plus de foyers que Pantin. La commune acquiert son indépendance en 1784 et devient le Pré-Saint-Gervais. La situation de dépendance à Pantin n'a pas incité le village à l'entretien de l'édifice qui se trouve en très mauvais état. La municipalité argue de son manque de moyens et demande à ce que la paroisse retourne dans le giron de Pantin ou soit rattachée à Belleville. En attendant, les fidèles continuent à se rendre à la messe dans les églises des communes voisines.
L'accroissement démographique du Pré-Saint-Gervais provoque l'évocation d'une possible reconstruction de l'église. C'est entre 1818 et 1820 que la nécessité de reconstruire l'église s'impose. Dans un premier temps, le conseil municipal pense élever un bâtiment avec les matériaux du précédent afin d'éviter un coût trop élevé. Mais les matériaux anciens n'étant pas ou peu récupérables, le neuf devient incontournable. Les moyens financiers étant très limités, les plans de l'architecte, Louis André Rebeilleau, datés de novembre 1820, montrent une église très simple, au plan rectangulaire, à nef unique de quatre travées, une abside voûtée en cul-de-four (voûte formée d'une demi-coupole) que surmonte le clocher.
La nouvelle église qui conserve le nom de Saint-Gervais-Saint-Protais est inaugurée le 19 juin 1825. Mais le souci permanent de faire le plus économique possible (comme le réemploi des anciennes ardoises pour la couverture) et le manque d'intérêt à l'entretien du bâtiment provoquent une dégradation rapide de l'édifice. Toutefois, la commune dispose désormais de sa propre église et de son propre curé. Aussi, malgré les différents conflits entre la Ville et la paroisse, entre le maire et le curé, une véritable église sera construite au début du XXe siècle. Aujourd'hui, l'ancienne église Saint-Gervais-Saint-Protais est désaffectée. Après avoir abrité successivement la maison des syndicats puis le dispensaire municipal, le centre de sécurité social s'est installé dans l'ancien édifice religieux.
À l'aube du XXe siècle, le Pré-Saint-Gervais compte quatorze mille habitants. L'église Saint-Gervais-Saint-Protais ne peut plus accueillir ses fidèles. L'architecte Barbier dessine les plans de la nouvelle église devant être érigée rue Paul-de-Kock et la première pierre est bénite le 18 mars 1912 par le chanoine Lefebvre, archidiacre de Saint-Denis. Placé sous la protection de la Sainte-Famille, le bâtiment est construit en moellons de granit. Son aspect robuste et sobre s'inspire des formes romanes. L'église se présente sous la forme d'un vaste rectangle arrondi aux angles à l'est. On y accède en façade par un large porche en plein cintre, surmonté d'un fronton reposant sur des piliers ronds, et sous lequel un panneau en relief représente la Sainte-Famille. Au-dessus, en élévation, on peut voir une fausse fenêtre à colonnes tandis que le clocheton est percé d'une baie jumelée.
La nef se compose de quatre travées éclairées par les vitraux du maître verrier Barillet. Les verrières rappellent les principaux événements de la vie du Christ et de la Vierge. Enfin, un orgue, antérieur à l'église puisque construit en 1910, surplombe le vaisseau central de l'édifice. L'église de la Sainte-Famille possède plusieurs sculptures en bois polychrome (provenant peut-être de l'ancienne chapelle) : une « Pieta » du XVIe siècle, un « Saint-Sébastien » et une « Sainte-Anne et la Vierge » datée des XVe-XVIe siècles. Un tableau (non daté) représente la Vierge entourée de sainte Anne, saint Joseph, l'enfant Jésus et saint Jean-Baptiste. Les fonts baptismaux, contemporains de la construction de l'église, sont constitués d'une cuve en marbre noir reposant sur un pied quadrangulaire en pierre. En élévation, au-dessus du couvercle en cuivre incrusté de pierres de couleur, se profile un saint Jean-Baptiste.
Une toile du XVIIe siècle, offerte par le préfet de la Seine en 1837, est accrochée dans l'église de la Sainte-Famille du Pré-Saint-Gervais. Sur ce tableau figure un Christ en croix attribué à un élève de Philippe de Champaigne. Philippe de Champaigne (1602-1674) dont l'œuvre est majoritairement religieuse est un adepte de la pensée janséniste. Son style premier, brillant et coloré, se teinte d'austérité et de gravité dès lors qu'il embrasse le culte janséniste. On retrouve dans le Christ en croix de la Sainte-Famille l'expression des personnages peints par Philippe de Champaigne. À l'arrière-plan, l'ombre d'une architecture pourrait évoquer l'abbaye de Port Royal des Champs, le siège des Jansénistes jusqu'à ce que, en 1710, Louis XIV en ordonne la destruction.