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La barrière d'octroi de La Villette : la Rotonde de Ledoux


La barrière d'octroi de La Villette : la Rotonde de LedouxLa barrière d'octroi de La Villette : la Rotonde de Ledoux

« Ah ! Monsieur Ledoux, vous êtes un terrible architecte ! » écrit Louis-Sébastien Mercier dans son Tableau de Paris, s’indignant « de voir les antres du fisc métamorphosées en palais en colonnes, qui sont de véritables forteresses », par Claude-Nicolas Ledoux, l’architecte des Barrières.

Rappelons que l’enceinte des fermiers généraux était une enceinte fiscale et non défensive. Toute marchandise entrant dans la ville est taxée de droits d’octroi. Les deux tiers de ces droits vont à l’État, le reste à la Ville dont il participe pour une part importante de ses ressources. Les Fermiers généraux sont chargés de la perception de ces droits au passage des "barrières". La fraude est énorme et très bien organisée, surtout par les marchands de vins et les cabaretiers car le vin et les alcools sont les marchandises les plus taxées.

Pour pallier la fraude, Lavoisier présente, en 1784, un projet pour la construction d’un mur. Un concert de protestations émanant des fraudeurs de tous poils s’élève, soutenus par les propriétaires qui, s’étant installés hors limite de l’ancien octroi, vont, désormais, devoir payer les taxes. La colère des faubourgs est d’autant plus grande que, contrairement à ce qui avait été prévu, ce n’est pas la Ville qui paie, mais le roi donc, avec les impôts du peuple.

Les travaux sont confiés à l’architecte Claude-Nicolas Ledoux dont le luxe déployé pour la construction des bâtiments d’octroi agace et l’on parle « d’arcs de triomphe pour les bureaux des faubourgs Saint-Martin (La Villette) et Saint-Denis ». Calonne, le Contrôleur général des Finances de Louis XVI, soutient Ledoux car la conception de ses bureaux d’octroi est en droite ligne avec l’idée d’un urbanisme monumental des Lumières et, de plus, ils contribuent à marquer clairement la périphérie de la capitale.

Il ne reste aujourd’hui que quatre de ces monuments fiscaux : celui de la barrière du Trône, cours de Vincennes, celui de la barrière d’Enfer, place Denfert-Rochereau, le poste d’observation de Monceau, marquant l’entrée de l’actuel parc Monceau, et la Rotonde de La Villette.

La Rotonde de La Villette n’est que le reste d’un ensemble asymétrique qui comportait deux barrières, la barrière Saint-Martin et la barrière de Pantin, situées la première du côté de l’actuelle rue de Flandre, la seconde sur l’ancienne route dite de Pantin, ou d’Allemagne, l’actuelle avenue Jean-Jaurès. Ces deux barrières d’octroi, composées chacune de pavillons identiques et aujourd’hui disparus, étaient reliées à la Rotonde par une grille. La Rotonde, quant à elle, était destinée à recevoir des bureaux mais aussi à loger les « gabelous », contrôleurs sédentaires chargés d’assurer la sécurité des commis face aux fraudeurs parfois un peu trop vindicatifs. Le bâtiment est réalisé selon la combinaison de deux solides : le cube, symbole de la stabilité pour Ledoux, et le cylindre. Pour simplifier, il est possible de dire de l’architecture de la Rotonde qu’il s’agit, en fait, d’un cylindre enfoncé dans un cube !

Le bief aval du canal de l’Ourcq, réalisé devant la Rotonde, constitue au début du XIXe siècle un vaste plan d’eau très apprécié des Parisiens. Ceux-ci y viennent pratiquer des jeux d’eaux nautiques, se baigner, voire patiner. Une abondante iconographie rend compte de ces divertissements. Vers 1840, le bâtiment abrite deux compagnies d’infanterie et un escadron de cavalerie de la garde municipale. Sur les plans d’époque, il est nommé « la gendarmerie ». L’annexion à Paris des terrains situés entre les anciennes limites de la capitale et l’enceinte bastionnée que fait édifier Thiers entre 1840 et 1845, repousse les limites de l’octroi. Les bureaux d’octroi étant désaffectés, la Rotonde sert d’entrepôt pour le sel (le droit particulier dont il fait l’objet ne sera supprimé qu’en 1945), transféré depuis l’entrepôt des douanes du canal Saint-Martin en 1860. Elle est ensuite louée, à partir de 1865, à la Compagnie des Entrepôts et Magasins Généraux. Elle le restera jusqu’en 1921. Ses bâtiments, restaurés en 1865, puis, après que l’incendie des docks de La Villette par les Communards, en 1871, les ait endommagés, sont utilisés comme entrepôts de douane par les EMGP. L’édifice est d’ailleurs dénommé « Douane » dans l’atlas des vingt arrondissements de Paris réalisé en 1868.

Il est étonnant que la Rotonde ait été épargnée lors de la construction du métro aérien, édifié à une époque où l'architecture de Ledoux est fortement décriée. Il est évident que l'édifice a été volontairement conservé si l'on considère la courbe en S du viaduc de la ligne 2 qui contourne la Rotonde. Un incendie ravage la Rotonde et ses bureaux au milieu des années 1930. Restaurés, plusieurs projets d'affectation voient le jour, mais sont tous repoussés. Finalement, une délibération du conseil municipal de Paris du 19 novembre 1959, affecte la Rotonde à la Commission du Vieux Paris, commission administrative dont le président est le maire de Paris. Depuis quelques années, la Commission du Vieux Paris a déménagé, abandonnant la Rotonde qui est aujourd'hui occupée par un restaurant. La Rotonde de Stalingrad accueille des événements d'affaires.

Dessin : View of the Barrière de la Villette in Paris / Christoffer Wilhelm Eckersberg (Danish, Blåkrog 1783–1853 Copenhagen) 1810–13 / MET NYC - Metropolitan Museum

Rotonde de la Villette dite Rotonde de Ledoux
Place de la Bataille de Stalingrad

75019 PARIS
48.8833146 , 2.3692991
Accès Accès
Vélib' : Quai de la Loire - Jean Jaurès (13m)
Vélib' : Quai de la Seine (15m)
Vélib' : Aqueduc - Villette (17m)
Vélib' : Quai de Valmy (24m)
Vélib' : Tanger - Place du Maroc (33m)
Rotonde de la Villette dite Rotonde de Ledoux, Place de la Bataille de Stalingrad, 75019 PARIS

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