Depuis longtemps, l’hygiène fait figure de rempart contre la progression des maladies infectieuses. Au-delà du caractère normatif visant le bon état physique et moral de la population laborieuse du XIXe siècle, l’hygiène modifie profondément les comportements et les mentalités. L’industrie sanitaire se fait l’écho des hygiénistes en commercialisant un important matériel sanitaire. Lorsque l’on connaît la réticence de la bourgeoisie à utiliser ce matériel, qu’elle possède pourtant à domicile, que dire des populations qui vivent dans les taudis. Les premiers H.B.M. eux-mêmes, s’ils proposent enfin un grand confort avec l’eau sur l’évier et un W-C particulier, négligent totalement l’aspect cabinet de toilette. Mais la mortalité galopante due à la propagation de la tuberculose incite les édiles, par crainte de la contagion, à se préoccuper de l’hygiène des plus démunis.
C’est durant les années de l’entre-deux-guerres que la construction d’établissements de bains-douches se multiplie. Avec l’augmentation massive de l’exode rural vers les villes, les taudis prolifèrent. Les municipalités de banlieue créent des structures sociales pour aider leur population majoritairement ouvrière à vivre plus dignement. Dès 1924, la municipalité de Bondy fait construire des bains-douches au centre du bourg ancien. Situé square du 8 mai 1945, il répond au style Arts déco en vogue à cette époque. Ses lignes rigoureuses et symétriques se combinent avec une ornementation aux motifs géométriques en céramiques et mosaïques polychromes.
L’architecte municipal de Pantin, Désiré Letailleur, réalise en 1924-1926, des bains-douches municipaux tout près de l’ancienne salle des fêtes, l’actuelle salle Jacques Brel. L’architecte se conforme aux règles de la symétrie en organisant le bâtiment autour d’un pavillon central à deux niveaux. Dans chaque aile, l’une pour les hommes, l’autre pour les femmes, le traitement est identique, mais quelques cabines plus spacieuses dotées de baignoires agrémentent le côté réservé aux femmes. L’éclairage et la ventilation sont assurés par de hautes fenêtres placées en imposte et une verrière percée dans la toiture en terrasse. C’est également Désiré Letailleur qui a réalisé les anciens bains-douches de la rue Charles-Auray, en 1924.
À Aubervilliers, sous le mandat de Pierre Laval (1883-1945), maire de la commune à partir de 1925, des travaux allant dans le sens de l’hygiène sont entrepris. Plusieurs établissements de bains-douches sont implantés dans la ville notamment dans le centre-ville (derrière le marché et aujourd’hui démoli) et non loin du quartier des Quatre-Chemins, rue Paul-Bert. Ce dernier, bien que construit en briques comme celui de Bondy, ne présente pas de lignes symétriques et rectilignes mais au contraire s’avance tout en rondeur avec sa rotonde d’angle. Il a été rénové puis transformé en un Centre médico-psycho-pédagogique (CMPP).
Au Blanc-Mesnil, la municipalité fait construire des bains-douches, vers 1930, dans le prolongement de la poste d’alors, avenue de la République. Le prix d’un bain équivaut à celui d’un verre de lait. Contrairement aux établissements de ce genre édifiés à la même époque, celui de Blanc-Mesnil est austère. La seule ornementation de sa façade est sa porte en arcade. L’établissement est fermé depuis 1976. Les anciens bains-douches de Noisy-le-Grand, construits vers 1930 à l’angle des rues Lucien-Sampaix et Georges-Laigneau, sont abrités dans une très belle bâtisse aux formes régulières. ¼uvre de la volonté hygiéniste de la municipalité, l’établissement était alimenté en eau par l’usine des eaux construite, à la fin du XIXe siècle, sur la rive droite de la Marne.