Histoire de la gare de Noisy-le-Sec, par Christian Fonnet, grand connaisseur de l’histoire du chemin de fer.
Le territoire d’Est Ensemble a lancé son Université populaire avec un premier cycle consacré aux grandes infrastructures de transport qui ont marqué le territoire : voies ferrées (Pantin, Noisy-le-Sec, Bondy), autoroutes (boulevard périphérique, A86, A3, A186), canal de l’Ourcq… C’est un territoire avec des infrastructures denses de transports, notamment ferroviaires, mises en place à partir du milieu du XIXe siècle, parallèlement à l’industrialisation.
Parmi les gares importantes figure celle de Noisy-le-Sec, ouverte en 1849. L’association Noisy-le-Sec Histoires lui a consacré une exposition en mai 2017. Une visite commentée de cette exposition a été proposée dans le cadre du programme de l’Université populaire d’Est Ensemble.
C’est Christian Fonnet, grand connaisseur de l’histoire du chemin de fer qui a commenté cette visite d’exposition, le samedi 20 mai 2017. Christian Fonnet a également proposé une conférence sur la ligne Paris > Meaux. Avant ces deux rendez-vous, Sonia Leveau, étudiante en Master Patrimoine et Musées à l’Université Paris I, a rencontré Christian Fonnet et l’a interrogé sur son parcours, son engagement, et sa connaissance de l’histoire du chemin de fer.
Ci-dessous, un bref portrait de Christian Fonnet et un focus sur l’histoire du chemin de fer à Noisy-le-Sec.
Christian Fonnet a habité durant son enfance près des voies ferrées à Noisy-le-Sec, ce qui explique son intérêt pour le chemin de fer. De sa fenêtre, il voyait la gare, le triage, le dépôt, l’atelier et les locomotives à vapeur. « Je reconnaissais les modèles, rien qu’au sifflet. » En 1973, il a effectué une licence de géographie à l’Université Paris XIII, puis a préparé sa maitrise, sous la direction de Paul Gerbod, sur « Noisy-le-Sec, de 1880 à nos jours ».
Après ses études, il entre à la Vie du Rail, où il restera 30 ans au poste de journaliste et conseiller technique. Il illustrait les articles et répondait aux demandes techniques de ces interlocuteurs. Il gérait entre autre la photothèque, son réseau de prédilection couvrant principalement le réseau-Est. Il fut ensuite gestionnaire de l'information à Rails & Histoire durant 6 ans.
Il a participé à l’écriture de trois livres sur le chemin de fer, et intervient dans de nombreuses conférences sur cette thématique.
Durant sa carrière, il a participé en 1983 au classement au titre des monuments historiques de la Pacific à Sotteville-lès-Rouen, ainsi que du viaduc de Barajol dans le massif Central, sur une ligne menacée. Aujourd’hui, cette ligne a été transformée en chemin de fer touristique. Le Gentiane Express passe sur ce viaduc.
À titre de loisirs, il est chauffeur de la locomotive à vapeur 141 TB 424, qui servait de train de banlieue. Elle était au dépôt de Noisy-le-Sec. À noter, la fabrication de 112 exemplaires de cette locomotive qui circulaient à Noisy le Sec, Vaires, la Villette, Nancy, et Erneville pour pousser les trains dans la rampe de Loxéville. Leurs carrières se sont effectuées principalement en banlieue jusqu’en 1962, à l’électrification des voies. Elles sont ensuite allées sur la ligne de Vincennes jusqu’en 1969. Cinq ont terminé à Provins, en 1972. Cette locomotive roule aujourd’hui en Bretagne, sur le chemin de fer touristique de Paimpol.
Dates et éléments sur l'histoire du chemin de fer à Noisy-le-Sec. D’après les sources de Christian Fonnet (article la Vie du Rail n° 1488).
En 1839, le Maire de Noisy s’est d’abord opposé à la venue du chemin de fer dans sa commune. Le tracé, prévu alors, longeait le canal de l'Ourcq (construit près de quarante années auparavant) et avait posé des problèmes d'expropriation. C'est seulement en 1843, que le tracé actuel est choisi par l'ingénieur chef M. De Sermet, après 6 projets présentés entre Paris et Meaux.
En 1846, les travaux sont entamés lorsque survient la crise économique annonciatrice des révolutions de 1848. Ces événements ralentissent le rythme de la construction et c'est seulement le 30 avril 1849 que circule le premier train entre la capitale et Lagny. Le 1er juillet c'est l'inauguration et le 5, l'ouverture de la ligne aux voyageurs. Noisy n'est qu'une simple gare de passage car il n'existe que deux voies. En 1856, se raccorde la ligne de Belfort et en 1882, la Grande Ceinture. C'est à partir de 1888 que la Compagnie de l'Est songe à la création du triage et au report des ateliers de la Villette et à la construction du dépôt. Le dépôt s’élève en 1891-1892 avec ses deux célèbres rotondes de 70 mètres de diamètre.
De 1911 à 1913, les ateliers du matériel roulant sont installés entre le dépôt et la route de Meaux tandis que la gare voyageurs s'agrandit en 1909. En 1914, près de 2 300 personnes travaillent à Noisy dans les différentes installations : gares, triages, dépôt, atelier, sur une population de 13 457 habitants. C’est un véritable n½ud ferroviaire qui se constitue, où Noisy devient gare régulatrice. Si Noisy a été bombardée en 1944, c’est parce que c’était un n½ud ferroviaire stratégique. C’est une ligne de l’est : Paris-Strasbourg, Paris-Mulhouse, ainsi que faisant partie prenante de la Grande Ceinture.
En ce qui concerne les dépôts, ils abritaient à l'origine des "Bourbonnais", des machines de banlieue (tous types) puis des 230 mixtes et de vitesse, des 140 pour marchandises enfin des Mikados après 1945 et la célèbre 230 G pour la vapeur. A partir de 1935, Noisy reçoit aussi des autorails ZO, ABV, VH, de Dietrich (dont les fameux autorails de commandement) enfin des Bugatti, RGP et Picasso.
L'entretien des voitures assure depuis 1980 la maintenance de l'intégralité du parc banlieue Est, cette opération ayant commencé progressivement à partir de 1974.
Les deux rotondes aujourd’hui démolies, étaient l’½uvre de l’architecte Müntz, en béton armé, en équation, 46 voies couvertes. L'architecte Laffaille a lui conçu la rotonde moderne.
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